Intervention du député Didace Pembe le 19 octobre 2016 sur le projet de loi sous examen sur le «terrorisme»

Kinshasa, le 19 octobre 2016

Intervention du député Didace Pembe sur le projet de loi sous examen sur le «terrorisme»

Honorable Président
Honorable membres du bureau
Honorable Députés Cher Collègues

La question du terrorisme est une question extrêmement importante et très complexe qu’il faudrait l’aborder avec tout le sérieux possible. La lecture du projet de loi sous examen m’a emmené à me poser quelques questions que je m’en vais partager avec vous:

La première, est celle du “pourquoi” d’une telle loi, dans la mesure où bon nombre d’infractions sont déjà traitées par les lois pénales en vigueur.

La deuxième critique que j’adresse à cette loi est basée sur la définition même du mot «terrorisme». En effet, le projet de loi sous examen définit de manière extensible, le délit à partir des intentions que l’auteur formule publiquement. Ces notions intentionnelles vont mener, je pense, les personnes qui sont chargées d’interpréter les actes délictueux notamment la police et l’ANR dans une politique subjective d’interprétation avec réel danger de rencontrer des abus graves.

En effet, même le soutien moral ou idéologique à un groupe terroriste est punis sans qu’aucun acte délictueux ne soit retenu, or, en sanctionnant l’intention, ce projet de loi malmène les fondamentaux du droit pénal car il y a un principe de droit qui dit que personne ne peut souffrir pour des actes qu’il a résolu en pensée.

Troisièmement, il faut retenir qu’il s’agit d’une législation d’exception qui sort du cadre du droit pénal classique. C’est-à-dire que des méthodes d’exceptions comme : application de méthodes d’enquête sécrète, de règles procédurales d’exception, la prolongation des périodes d’arrestation, restriction au droit d’être défendu par un avocat, seront d’application. Et je pense qu’à mon humble avis ces méthodes devraient être déjà insérées dans la loi.

Quatrièmement, ce type de loi peut servir d’instrument d’ intimidation de la part des autorités, dans les actions sociales ou politique de masse en justifiant sous prétexte de lutte contre le terrorisme, des arrestations et détentions préventives sans que cela n’aboutisse spécialement à des sanctions. Je suggère en vue de prévenir ces intimidations, d’introduire des clauses pour garantir tout abus politique.

Cela suppose qu’on prévoit dans la loi, que toute organisation dont l’objet réel est exclusivement d’ordre politique, syndicale, philanthropique ou religieux ou qui poursuit tout autre but légitime ne peut, en tant que telle, être considéré comme un groupe terroriste.

La justification d’une telle proposition trouve son fondement dans le problème posé par la définition large du mot «terrorisme».
En effet, les notions telles que « intimider, provoquer, forcer, exercer des pressions, perturber le fonctionnement normal des services publics etc… sont subjectives et d’interprétations multiples. Cela autorise des applications injustes et abusives.

Pour terminer Honorable président,
il faut garder à l’esprit que dans dix ans deux milliards de personnes sur terre vivront dans des conditions d’extrême pauvreté et ne disposeront pas d’eau potable. La pauvreté, l’injustice, la guerre, la terreur et l’oppression ne disparaissent pas en contrôlant ou en limitant les droits démocratiques de la population ou d’une partie d’entre elle.

Au contraire, les libertés et les droits doivent admettre que la population puisse s’organiser et se réunir librement. Voila pourquoi des discussions en profondeur doivent être menées pour trouver la définition la plus idoine du mot «terrorisme».

Je vous remercie.

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