Didace Pembe à propos de la pluie surprise tombée sur Kinshasa ce 23 juin 2022

Le 23 juin 2022 vers 10h du matin, les habitants de Kinshasa ont été surpris par une pluie observée dans plusieurs quartiers de la capitale. Le fait est remarquable car la dernière pluie observée un 23 juin à Kinshasa date de 1961. La grande saison sèche débute en moyenne le 15 mai et est caractérisée par l’absence de précipiations et des températures nettement moins élevées.

Cette pluie inopinée ne peut être attribuée au changement climatique étant donné que le phénomène avait été observé 61 ans plus tôt.

Cette pluie de jeudi est très acide car en tombant, elle s’est chargée de particules matières (PM), d’ozone (O3), de dioxyde d’azote (NO2), de monoxyde de carbone (CO), de dioxyde de soufre (SO2) et de plomb (Pb) ainsi que d’autres particules nocives. Ce phénomène météorologique nous interpelle donc sur un autre problème de santé publique largement ignoré par nos autorités. Il s’agit de la pollution de l’air dans la capitale qui est située dans une cuvette avec peu de vent pour évacuer les particules toxiques.

L’’Organisation Mondiale de la Santé «OMS» estime que la pollution de l’air est à l’origine de près de 200.000 décès chaque année en Afrique (WHO, 2016). Si cette question sur la dégradation de la qualité de l’air reste pendante, le continent Africain atteindrait 600.000 décès en 2050.

Le trafic routier est intense dans la ville de Kinshasa, avec presque 90 % de vieux véhicules en mauvais état, ne disposant pas de pot catalytique ni d’autres dispositifs d’épuration de gaz. Les moteurs diesel rejettent des doses massives de dioxyde d’azote (NO2) tandis que les moteurs essence utilisent toujours un carburant avec une teneur en plomb égale à 0,10 g/l. Or il n’existe pas de seuil en-dessous duquel l’exposition au plomb n’aurait pas d’effets nocifs (WHO, 2019).

En 2017, la ville de Kinshasa ne disposait même pas d’une stratégie de collecte de données en rapport avec la pollution de l’air. C’est alors qu’un système de télédétection atmosphérique a été installé sur le toit de la faculté des Sciences de l’UniKin dans le cadre d’une collaboration avec l’Institut d’Aéronomie Spatiale de Belgique (IASB).

Ces instruments fournissent des renseignements sur les densités de la colonne verticale troposphérique de quelques molécules traces dont le redoutable NO2. Comme le satellite l’avait déjà observé depuis de nombreuses années, la signature saisonnière du NO2 est marquée par un pic en saison sèche, expliqué par l’absence de précipitations pour “laver” l’atmosphère.

En conséquence, la pollution de l’air diminue durant la saison des pluies grâce aux précipitations. Mais ces pluies acides polluent l’eau du fleuve et les nappes phréatiques. Les végétaux que nous consommons contiennent du plomb et n’effectuent plus correctement la photo-synthèse. En saison sèche, la pollution en suspens est “respirée” par nos concitoyens.

Voyez les recommandations du site “Indice de Qualité de l’Air (IQA) et Pollution de l’Air à Kinshasa” par satellite pour la journée du 23 juin 2022.

  • Le niveau de pollution de l’air indique sans équivoque “Mauvais pour la santé”.
  • L’indice de pollution de l’air est de 153* IQA US, soit une valeur 12 fois supérieure à la valeur guide annuelle de l’OMS. Les principaux polluants sont les PM2.5 (gaz d’échappements).
  • Le site préconise les comportements suivants : 1/ porter un masque en extérieur, 2/ fermer les fenêtres pour empêcher à l’air pollué de rentrer, 3/ s’équiper d’un purificateur d’air, 4/ éviter les activités de plein air.Autant dire que ces mesures sont difficiles à imposer aux 18 millions d’habitants de Kinshasa.

https://www.iqair.com/fr/democratic-republic-of-the-congo/kinshasa


Comment améliorer cette situation?

Rappelons que Kinshasa est alimentée en électricité verte, produite par ses barrages hydro-électriques dont Inga avec ses perspectives d’extension. De plus, le pays dispose en son sol de lithium et de cobalt qui sont les composants principaux des coûteuses batteries équipant les véhicules électriques.

  • Pour montrer l’exemple, les compagnies de transport public pourraient progressivement remplacer leur parc de véhicules thermiques par des véhicules électriques.
  • La défiscalisation de l’importation et de la vente des véhicules électriques constituerait un incitatif sérieux pour l’utilisation de ces véhicules propres. Ajoutez à cela le coût réduit des entretiens et la faible consommation.
  • Une infime partie des recettes de l’exploitation du cobalt et du lithium suffirait pour financer les bornes de recharge publiques et privées.

Didace Pembe Bokiaka
Député national élu de la circonscription de Mushie, Province du Maï-Ndombe
Président du parti AECO – Les verts