Intervention à l’assemblée nationale du député Didace Pembe Bokiaga concernant la proposition de loi du député Guy Mafuta Kabongo déterminant les principes fondamentaux relatifs à l’exercice du droit de grève en RDC

Texte intégral.

Honorable Président,
Honorables membres du bureau,
Honorables députés, distingués et respectueux collèges,

Dans un pays en proie à des conflits individuels et collectifs du Travail, il était plus qu’opportun que l’exercice du droit de grève soit réglementé dans l’optique, d’une part, de permettre de revendiquer leurs droits, et d’autre part, de prévenir toutes sortes de dérives afférentes à l’exercice de ce droit.



A cet effet, je félicite et salue l’initiative de notre collègue Guy Mafuta qui a pris le soin d’intégrer dans sa proposition toutes les questions qui échappaient jusque là à lé réglementation.

Néanmoins, je me permets de faire quelques observations sur certaines questions qui ne ressortent pas clairement dans la proposition de loi sous examen.

La première observation se rapporte à la limitation du temps de grève.

En effet, je suis contre la limitation du temps de grève car l’exercice du droit de grève vise non seulement à mettre la pression sur l’employeur en vue d’obtenir de lui l’amélioration des conditions de travail mais aussi à réparer les injustices que subissent les salariés.

A cet égard, il conviendrait de noter que pour que cet objectif soit atteint, il est parfois nécessaire que le mouvement de grève sur un délai assez long.

La limitation dans le temps du droit d’exercer la grève aurait pour conséquence de pousser les mouvements syndicaux à mener des actions successives qui auraient pour effet de bloquer l’entreprise.

La deuxième observation concerne la retenue de salaire. A ce sujet, je pense qu’il y a lieu de faire un distinguo entre la retenue de la rémunération proportionnelle à la durée de l’arrêt du travail dans le cadre des secteurs privés et la retenue du salaire dans le secteur public.

Je suggère, pour ma part, concernant le secteur public, qu’il convient de définir clairement combien perdrait un fonctionnaire car il n’est pas facile d’établir dans le secteur public le rapport entre le temps et le travail.

Il y donc lieu de dire par exemple le fonctionnaire perdra un trentième de son salaire par jour de grève.

La troisième observation est afférente à la notion de faute lourde qui n’est pas clairement définie et risque de conduire à des abus.

Je pense qu’il y a lieu que les actes pouvant être qualifiés de faute lourde pendant l’exercice du temps de grève soient définis.

Notamment la dégradation des locaux et des matériels de l’entreprise, les violences à l’encontre du personnel ou des chefs hiérarchiques, le blocage à l’accès au site, et j’en passe.

Quatrièmement, en rapport avec l’interdiction de sanctionner un gréviste, nous savons tous que dans la pratique, les employeurs procèdent à des sanctions administratives à retardement. C’est à dire, en recourant à des sanctions indirectes après l’écoulement d’un certain laps de temps.
Quelle garantie a donc le gréviste en pareil cas?

Enfin, il ressort de cette proposition que certains fonctionnaires peuvent être réquisitionnés durant l’exercice de leur droit de grève pour poursuivre leur travail et qu’ils disposent néanmoins d’un droit de recours devant le Conseil d’Etat contre cette décision de réquisition.

Cependant, l’auteur de la proposition de loi a oublié qu’il avait limité l’exercice de ce droit de grève à 15 jours maximum. Alors qu’on sait pertinemment bien qu’une contestation ne peut être portée devant le Conseil d’Etat qu’après 3 mois à dater à dater de l’exercice du recours préalable auprès de l’autorité administrative ayant pris l’acte.

Ce ce fait, l’application de cet article serait compliqué parce que l’agent réquisitionné ne pourra pas saisir la haute juridiction administrative étant donné le temps pour lui d’introduire une action d’annulation de l’acte, le mouvement de grève aura déjà cessé.

Outre cela, il sied de rappeler que les requêtes portées devant le Conseil d’Etat n’ont pas d’effet suspensif.

Voilà pourquoi je suggère qu’aucune durée minimale ou maximale ne soit fixée à l’exercice de ce droit.

Honorable Président, voilà l’essentiel de mon intervention, je vous remercie.